Le débat politique est
devenu si sommaire dans notre pays que l’on feint d’opposer souverainisme et
libéralisme alors que les deux doctrines sont complémentaires.
Chacune ne se suffit pas à elle-même et c’est pourquoi le souverainisme seul et le libéralisme seul ne constituent pas une offre politique viable pour nos concitoyens.
Chacune ne se suffit pas à elle-même et c’est pourquoi le souverainisme seul et le libéralisme seul ne constituent pas une offre politique viable pour nos concitoyens.
En effet, le souverainisme
ne nous dit rien sur le régime interne de la Nation, ni sur ce que devrait être
sa gestion économique, politique et sociale. L’Etat souverain est une
proposition nécessaire mais non suffisante. Il peut en effet être indifféremment
démocratique ou dictatorial, étatique ou libéral. Il faut apporter une réponse
claire et précise aux électeurs, qui demandent légitimement : le souverainisme
pour faire quelle politique ?
Le libéralisme, doctrine
de la souveraineté de l’individu, ne nous dit rien sur le cadre de la société
dans laquelle s’inscrit cette liberté individuelle, Etat mondial, régional,
national ou absence d’Etat au bénéfice d’une structuration par des
organisations fonctionnelles, internationales ou locales. Et les électeurs de
demander légitimement : le libéralisme pour quelle société ?
Sur la majeure partie de
son cours, le XXe siècle a conjugué pour les Etats une période d’expansion
nationaliste et souvent d’impérialisme à l’extérieur et d’interventionnisme
dirigiste à l’intérieur. D’où une confusion, purement conjoncturelle, entre
souveraineté des Etats et politique étatistes. Sont victimes de cette confusion
intellectuelle les souverainistes, qui ne jurent que par l’étatisation interne
de l’économie et de la société et qui font du libéralisme et des marchés
l’ennemi, et les libéraux qui ne voient dans l’Etat que le Léviathan qu’il faut
abattre.
On confond ainsi une
conjonction contingente de deux courants, nationalisme et étatisme, avec la nature
profonde du souverainisme et du libéralisme qui ont su s’associer parfaitement,
pour le plus grand bien des libertés et de la prospérité des nations, au XIXe
siècle et dans les politiques conduites en France en 1958 et 1986.
Le nouveau millénaire
s’ouvre sur deux tendances lourdes : d'une part, l’échec et la dissolution des
empires construits artificiellement - et l’Europe fédérale connaîtra la même
sanction si elle persiste dans son mépris des réalités nationales - et, d'autre
part, la mondialisation des échanges et la fluidité des facteurs productifs qui
conduisent les Etats comme les entreprises à se restructurer et à se concentrer
sur leurs métiers fondamentaux. C’est ce formidable printemps des libertés que
les politiques ont le devoir d’organiser pour éviter un divorce entre les
peuples et leurs gouvernements.
Les souverainistes sont
les défenseurs, à juste titre, de l’autorité de l’Etat. Une évidence doit s’imposer
à nous : un Etat toujours plus vaste, omniprésent, se mêlant de tout,
boulimique, n’est pas un Etat fort mais un Etat faible et pourtant contraignant.
Il décourage les initiatives économiques, affaiblit le tissu d’entreprises et
se condamne à effectuer des ponctions toujours plus lourdes sur le revenu
national, ce qui étouffe un peu plus l’initiative dans une société assistée.
Cet étatisme-là condamne l’idée souverainiste car il entraîne la nation vers la
paupérisation matérielle et l’assèchement de ses capacités créatrices.
Les libéraux sont les
défenseurs, à juste titre, des libertés individuelles. Une évidence doit s’imposer
à nous : ces libertés ne peuvent s’épanouir que dans le cadre d’un Etat
souverain qui, seul, en assure la caution démocratique par un contrôle
politique partagé. On ne réussit pas une réforme libérale en remettant son sort
à des organismes supranationaux dont l'efficacité est réduite et qui ne sont
pas contrôlés démocratiquement par les intéressés eux-mêmes.
Une nation indépendante
qui veut une économie prospère a besoin d’un Etat souverain, démocratiquement
contrôlé et qui applique des politiques résolument libérales et sociales. Un Etat
souverain a besoin d’une économie vigoureuse. Sa souveraineté consiste à faire
des choix et à se concentrer sur les politiques prioritaires (éducation, sécurité,
allégement des charges, politique démographique) au lieu de diluer ses actions
dans des interventions de plus en plus nombreuses et de moins en moins
efficaces.
C’est ce souverainisme
libéral qui doit rendre à la France ses marges de manœuvre et son rayonnement
international. Il correspond à l’offre politique qu’attendent les Français. Nous
changeons de siècle et il faut oublier les formules dépassées du
national-étatisme du XXe siècle.
Nous souhaitons rassembler
tous ceux qui pensent que sans conjugaison du souverainisme et du libéralisme
nous perdrions et notre liberté collective et notre liberté individuelle.
L’alternative fédéralisme-étatisme n’est pas pertinente, il nous faut
promouvoir l’autorité de l’Etat au service de l’initiative individuelle pour la
grandeur de la France.
Post-scriptum: Je ne mettrais que deux bémols à ce manifeste:
-Il fait usage, à la suite de Pierre Lemieux, du concept
de "souveraineté de l'individu", lequel ne veut rien dire (il
vaudrait mieux parler d'autonomie ou tout simplement de liberté). Et ceci en
raison du fait que la souveraineté un caractère général, public, politique. Elle peut se rapporter à l'Etat, on parlera alors d'un Etat
souverain, c'est-à-dire d'un Etat qui ne dépend que lui-même pour prendre ses propres
décisions (à l'inverse d'une colonie, ou d'un Etat membre d'une Fédération, qui
limite son champ d'action). La souveraineté peut aussi se rapporter à la Nation, elle exprime alors le caractère
démocratique du régime, par opposition à une monarchie (la souveraineté n’est
donc pas le Souverain).
-Ensuite, il est erroné de
parler de politiques libérales pour la période 1958-1986.
On sait que la tentative
de M. Rosa de libéraliser le parti de M. Dupont-Aignan a fait long feu, tout
comme les efforts (quelque peu ambigüs) de ce dernier en direction du
rétablissement de la souveraineté nationale sont demeurés inefficaces. Et
pourtant. Sic itur ad astra.
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